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Guerre de Cent Ans
La guerre de Cent Ans couvre la période de 116 ans (1337 à 1453) pendant laquelle s’affrontent la France et l’Angleterre lors de nombreux conflits, entrecoupés de trêves plus ou moins longues.
La guerre commence lorsque Édouard III d’Angleterre envoie un défi (déclaration de guerre) au roi de France Philippe VI de Valois. Le traité de paix définitif, signé le 29 août 1475 à Picquigny en Picardie, en marque officiellement la fin. Cependant, on retient plutôt l'année 1453, date à laquelle les Anglais sont totalement chassés de France (sauf Calais).
Le conflit a débouché sur la constitution de deux nations européennes indépendantes : la France et l’Angleterre qui, jusqu’alors, étaient imbriquées juridiquement et culturellement, et étaient en lutte pour le contrôle territorial de l’Ouest de la France. Pour le contrôle de ce territoire, les Plantagenêt (dynastie royale anglaise) et les Capétiens avaient déjà lutté près de 140 ans, entre 1159 et 1299. Cette première période avait vu évoluer les deux royaumes d’une organisation féodale très morcelée à une structure d’État centralisé. Le problème posé par le duché de Guyenne n’ayant pas été résolu, (le roi d’Angleterre étant théoriquement vassal du roi de France en tant que duc d’Aquitaine) à la fin du dernier conflit, mais aussi leurs intrigues pour prendre le contrôle de la Bretagne et des Flandres sont à l’origine du déclenchement des hostilités. Cependant, la cause profonde du conflit est la crise démographique puis économique et sociale que traverse le monde médiéval occidental depuis le début du XIV siècle.
Bataille de Crécy (1346) illustration tirée des Chroniques de Jean Froissart.
Forces en présence
Royaume de France
Le royaume de France, irrigué par de grands bassins fluviaux et bénéficiant d'un climat favorable a une agriculture florissante. Il est, avec ses 17 millions d’habitants, la première puissance démographique d’Europe. Sa société agricole est fondée sur un régime féodal et religieux très hiérarchisé. La capacité agricole permet de nourrir la population (il n'y a plus eu de famine depuis le XII ècle) qui a besoin de la noblesse pour défendre les terres.
Le clergé joue un rôle social majeur dans cette organisation de la société. Les clercs, sachant lire et compter, gèrent les institutions ; les religieux font fonctionner les œuvres caritatives et les écoles ; par le biais des fêtes religieuses, le nombre des jours chômés atteint 140 par an.
Yvain secourant la damoiselle. Enluminure tiré d'une version de Lancelot du Lac du XVe siècle.
Le chevalier doit avoir un comportement loyal, le combat est l'occasion de justifier son statut social.
De la même manière, la noblesse doit conjuguer richesse, pouvoir et bravoure sur le champ de bataille : vivant du labeur paysan, le maître se doit de manifester sa largesse en entretenant la masse de ses pendants. L'Église a œuvré pour canaliser les chevaliers-brigands dès la fin du X ècle. À partir du concile de Charroux en 989, les hommes en armes sont priés de mettre leur puissance au service des pauvres et de l'église et deviennent des milites Christi (Soldats du Christ). Depuis le XIII ècle, le roi de France avait pu faire admettre l'idée que son pouvoir de droit divin lui permettait de créer des nobles. La noblesse se différencie donc du reste de la population par son sens de l'honneur et doit faire montre d'esprit chevaleresque, protéger le peuple et rendre justice en préservant un certain confort matériel. Elle doit justifier sur le champ de bataille son statut social : l’adversaire doit être vaincu face à face dans un corps à corps héroïque. L’armée est donc structurée autour de la chevalerie la plus puissante d’Europe, cavalerie lourde combattant de front, au corps à corps. Cette volonté de briller sur les champs de bataille est accrue par l’habitude de l’époque de faire des prisonniers et de monnayer leur libération contre rançon. La guerre devient donc très lucrative pour les bons combattants et les risques d’être tués sont donc amoindris pour les autres. Depuis Philippe le Bel, le roi peut convoquer «ban et l'arrière-ban», c'est-à-dire tous les hommes de 15 à 60 ans, de toute condition (chevaliers et paysans, jeunes et vieux, riches et pauvres). Vers 1340, Philippe VI peut compter sur 30 000 hommes d'armes ainsi que 30 000 hommes de pied. Numériquement, c'est inégalable, car l'entretien d'un tel nombre de combattants représente un coût extraordinairement élevé, mais c'est une armée hétéroclite et peu disciplinée.
Pour asseoir leur pouvoir face à la grande noblesse et à la papauté, les Capétiens ont donné des gages au peuple : créations de villes franches avec octroi de chartes de franchises, création des états généraux... L'équilibre social passe par l'acceptation par le peuple d'un pouvoir royal fort, qui l’émancipe de l’arbitraire féodal, et une administration de plus en plus centralisée qui lui assure un certain confort matériel.
À la veille de la guerre de Cent Ans, ce système se fragilise car à la suite de la croissance démographique qui a lieu depuis le X e siècle, on assiste à une surpopulation des campagnes et à une demande d’autonomie des villes. La taille des parcelles des paysans se réduit et les prix agricoles chutent : les ressources fiscales de la noblesse diminuent et il devient impératif de briller sur le champ de bataille pour renflouer ses finances.
En trois siècles, les rois capétiens ont réussi à consolider leur autorité et à agrandir leur territoire, aux dépens des Plantagenêt. Le prestige royal de la France est immense, et, au temps de Philippe IV le Bel, le réseau d’alliances françaises s’étend jusqu’en Russie.
Toutefois, malgré les confiscations territoriales de Philippe II Auguste, Saint Louis et Philippe IV le Bel, les rois d’Angleterre ont conservé l’étroit duché de Guyenne et le petit comté de Ponthieu : le roi d’Angleterre est ainsi le vassal du roi de France.
Royaume d'Angleterre
La Magna Carta, ou «Charte»
Le royaume d’Angleterre est beaucoup moins peuplé (quatre millions d’habitants). Le refroidissement climatique qui touche l’Europe à partir du XIII e siècle oblige le pays à renoncer à certaines ressources agricoles (par exemple : le vin qui était produit dans tout le sud de l’Angleterre n’est progressivement produit qu’en Guyenne) et à opter pour une économie fondée sur la spécialisation et le commerce. Le climat pluvieux et les pâturages verdoyants favorisent l’élevage (plus particulièrement des ovins) qui permet une production importante de la laine utilisée par les tisserands et les drapiers (les ovins anglais produisent une laine particulièrement fine et d’excellente qualité pour le filage). L’artisanat, le commerce et donc les villes se sont développés. Les habitants des villes ont surtout besoin de liberté d’entreprendre et de limiter la pression fiscale (une grande partie des finances de l'état vient de la taxe sur la laine). Ce besoin a abouti à l’octroi de la Grande Charte de 1215 qui garantit la liberté des villes et donne au parlement un pouvoir de contrôle sur la fiscalité. Le commerce rend l’Angleterre très dépendante de la Guyenne (car elle produit des vins qui à l’époque sont plus salubres que l’eau), des Flandres (dont les drapiers achètent la laine) et de la Bretagne (qui lui vend du sel indispensable à la conservation des aliments).
Depuis deux siècles, la souveraineté sur l'ouest de la France, du duché d'Aquitaine au riche et puissant comté de Flandre, est à l'origine de conflits et d'intrigues entre Capétiens et Plantagenêts. Cette lutte commencée au milieu du XII e siècle avec un énorme avantage pour l’Anglais (qui possédait alors l’Anjou, la Normandie, le Maine, le Poitou, l’Aquitaine et le Limousin), se termine par la confiscation de ses possessions au profit du roi de France. Du grand empire Plantagenêt, il ne reste plus qu’une Aquitaine diminuée et réduite à la côte gasconne et à Bordeaux, nommée Guyenne.
D’autre part, l’Angleterre prend part à la 2 e guerre d'indépendance d'Écosse (1332 à 1357). Depuis 1296, profitant de la mort d’Alexandre III sans héritier mâle et une tentative de prise de contrôle par mariage, l’Angleterre considère l’Écosse comme un État vassal. Cependant, les Écossais ont contracté avec la France, la Auld Alliance, le 23 octobre 1295, et Robert Bruce, lors de la bataille de Bannockburn, a écrasé la chevalerie anglaise pourtant très supérieure en nombre grâce à une armée essentiellement composée d’hommes d’armes à pied protégés des charges par un premier rang de piquiers. Les Anglais adaptent donc leur manière de combattre en diminuant la cavalerie mais en utilisant plus d’archers et d’hommes d’armes à pied protégés des charges par des pieux plantés dans le sol (ces unités pour accroître leur mobilité se déplacent à cheval mais combattent à pied). Édouard III met en œuvre cette nouvelle façon de combattre en soutenant Édouard Balliol contre les partisans de David II, le fils de Robert Bruce. Grâce à cette tactique, les Anglais remportent plusieurs batailles importantes dont la bataille de Dupplin Moor en 1332 et celle de Halidon Hill en 1333. David II doit s’enfuir et trouve refuge en France où il est accueilli par Philippe VI de Valois. Édouard Balliol devient roi d’Écosse, vassal de l’Angleterre et honni par son peuple. Grâce à cette campagne, Édouard III peut disposer d’une armée moderne et rodée aux nouvelles tactiques (il y a aussi expérimenté la stratégie des chevauchées qui consiste à piller le pays sur des distances énormes grâce à une armée montée).
La langue officielle est le franco-normand - soit un français mâtiné de mots nordiques apportés par les Vikings - (depuis 1066, conquête par Guillaume le Conquérant - jusqu’en 1361, décret d’Édouard III), bien que l'anglo-saxon continue d'être employé par le peuple.
Origines du conflit
Si on trouve les raisons profondes du conflit dans la crise démographique, économique et sociale que traverse l’Europe du XIV e siècle, le déclenchement de la guerre est motivé par la montée progressive de la tension entre les rois de France et d’Angleterre au sujet de la Guyenne, des Flandres et de l'Écosse. La question dynastique, posée par une interruption de la descendance mâle directe des Capétiens en est le prétexte officiel.
Causes culturelles, démographiques, économiques et sociales du conflit
Alors que, sous l’effet des progrès des techniques agraires et des défrichements, la population s’accroît en Occident depuis le Xe siècle, on franchit un seuil qui dépasse les capacités de productions agricoles dans certaines zones d’Europe dès la fin du XIIIe siècle. Avec le jeu des partages successoraux les parcelles se réduisent : elles n’ont plus en 1310 que le tiers de leur superficie moyenne de 1240. Certaines régions comme les Flandres sont en surpopulation et essayent de gagner des terres cultivables sur la mer, néanmoins pour couvrir leurs besoins, elles optent pour une économie de commerce permettant d’importer les denrées agricoles. En Angleterre, dès 1279, 46% des paysans ne disposent que d’une superficie cultivable inférieure à 5 hectares. Or, pour nourrir une famille de 5 personnes, il faut de 4 à 5 hectares. La population rurale s’appauvrit, le prix des produits agricoles baisse et les revenus fiscaux de la noblesse diminuent alors que la pression fiscale augmente et donc les tensions avec la population rurale. Beaucoup de paysans tentent donc leur chance comme saisonniers dans les villes pour des salaires très faibles engendrant aussi des tensions sociales en milieu urbain. Le refroidissement climatique provoque de mauvaises récoltes qui se traduisent du fait de la pression démographique en famines (qui avaient disparu depuis le XIIe siècle) dans le nord de l’Europe en 1314, 1315 et 1316 : Ypres perd 10% de sa population et Bruges 5% en 1316.
La noblesse doit compenser la diminution de ses revenus fonciers et la guerre en est un excellent moyen : par les rançons perçues après capture d’un adversaire, le pillage et l’augmentation des impôts justifiée par la guerre. C’est ainsi que la noblesse pousse à la guerre et particulièrement la noblesse anglaise dont les revenus fonciers sont les plus touchés. En France, le roi Philippe VI a besoin de renflouer les caisses de l'état et une guerre permettrait de lever des impôts exceptionnels.
Sphères d'influences économiques et culturelles de la France et de l'Angleterre
Sphères d'influence et principaux axes commerciaux au Royaume de France en 1330.
Depuis Saint Louis, la modernisation du système juridique attire dans la sphère culturelle française de nombreuse régions limitrophes : en particulier en terres d'Empire, les villes du Dauphiné ou du comté de Bourgogne (future Franche-Comté) recourent depuis Saint Louis à la justice royale pour régler des litiges : le roi envoie, par exemple, le Bailli de Mâcon qui intervient à Lyon pour régler des différents, comme le sénéchal de Beaucaire intervient à Vivier ou à Valence. Les rois de France savent attirer à leur cour la noblesse de ces régions en allouant des rentes et en se livrant à une habile politique matrimoniale. Les comtes de Savoie prêtant hommage au roi de France contre l'octroi de pensions ; Jean de Luxembourg, roi de Bohème et beau-père de Jean le Bon mourant héroïquement à Crécy ou le comte Humbert II ruiné du fait de son incapacité à lever l'impôt et sans héritier après la mort de son fils unique, vendant le Dauphiné à Philippe VI sont de parfaites illustrations de ce phénomène. Inversement, le fait que le roi d'Angleterre soit vassal du roi de France pour la Guyenne lui pose problème car tous les litiges peuvent être réglés à Paris et donc en sa défaveur.
L’essor du commerce a rendu certaines régions dépendantes économiquement de l’un ou de l’autre royaume. À cette époque, le transport de fret se fait essentiellement par voie maritime ou fluviale. La Champagne et la Bourgogne alimentent Paris via la Seine et ses affluents et sont donc pro-françaises. La Normandie est partagée car elle est le point d'union entre ce bassin économique et la Manche qui devient une zone d'échanges de plus en plus intenses grâce aux progrès des techniques maritimes (le contournement de la péninsule ibérique par les navires italiens devient de plus en plus fréquent). L’Aquitaine qui exporte son vin en Angleterre, la Bretagne qui exporte son sel et les Flandres qui importent la laine britannique ont tout intérêt à être dans la sphère d'influence anglaise.
Ainsi les Flamands en voulant échapper à la pression fiscale française, se révoltent de manière récurrente contre le roi de France ; d'où les batailles successives de Courtrai en 1302 (où la chevalerie française est laminée) de Mons-en-Pévèle en 1304 et de Cassel en 1328 (où Philippe VI mate les rebelles flamands). Les Flamands apportent leur soutien au roi d'Angleterre, déclarant même en 1340 qu'Édouard III est le légitime roi de France. Les deux États ont donc intérêt à augmenter leurs possessions territoriales pour accroître leurs rentrées fiscales et renflouer leurs finances. Dès lors, les intrigues des deux rois pour faire passer la Guyenne, la Bretagne et les Flandres sous leur influence conduisent rapidement à la guerre entre les deux États: elle durera 116 ans.
La question dynastique
Descendance de Philippe III le Hardi, roi de France (1270-1285)
Pour comprendre la question dynastique de 1328, il faut remonter une dizaine d’années dans le temps :
En 1316, la mort de Louis X le Hutin, deux ans seulement après celle de son père Philippe le Bel, marque la fin du miracle capétien : de 987 à 1316, les rois capétiens ont toujours eu un fils à qui transmettre la couronne à leur mort. De sa première épouse, Marguerite de Bourgogne qui fut condamnée pour infidélité, Louis X le Hutin n’a qu’une fille, Jeanne de Navarre. À sa mort, sa seconde femme attend un enfant. Un fils naît : Jean I dit le Posthume, mais il ne vit que quelques jours. Cas inédit jusqu’alors, l’héritier direct du royaume de France se trouve donc être Jeanne de Navarre, une femme. La décision qui est prise à ce moment est très importante, car elle est devenue coutume et fut appliquée sur la question dynastique qui se posa en 1328. L’infidélité de la reine Marguerite n'est qu'un prétexte pour l’éviction de sa fille Jeanne, et du choix de Philippe V (frère de Louis X le Hutin) comme roi de France. En fait, il s’agit d’un choix géopolitique, le refus de voir un éventuel étranger épouser la reine et diriger le pays. Le choix du monarque français se fonde sur l'hérédité et le sacre, mais l’élection reprend ses droits en cas de problème. Le principe de la loi salique découle de la volonté des Capétiens de renforcer leur possessions en rattachant à la couronne les fiefs de leurs vassaux sans héritiers mâles : Philippe le Bel avait introduit la «clause de la masculinité», selon l’expression de Jean Favier, en révisant, la veille de sa mort, le statut de l’apanage de Poitou qui, «faute d’héritier mâle, reviendrait à la couronne de France». La loi salique n’est pas invoquée lors du choix du nouveau roi de France. Ce n’est que trente ans plus tard, vers 1350, qu’un bénédictin de l’abbaye de Saint-Denis, qui tient la chronique officielle du royaume, invoque cette loi pour renforcer la position du roi de France dans le duel de propagande qu’il livre à Édouard III d’Angleterre. Cette loi date des Francs et stipule que les femmes doivent être exclues de la «terre salique». Salique provient de la ville de Sala, aujourd'hui Overijse, en Belgique, terre des Francs saliens. Cette loi est reprise, adaptée à la situation et avancée comme argument de poids dans les disputes sur la légitimité du roi.
Après le court règne de Philippe V, décédé sans héritier mâle, c’est son plus jeune frère, Charles IV, qui, bénéficiant du précédent posé par son aîné, ceint à son tour la couronne. Mais son règne dure également peu de temps.
Quand ce troisième et dernier fils de Philippe le Bel meurt sans descendant mâle en 1328, la question dynastique est la suivante : Isabelle de France, dernière fille de Philippe le Bel, a un fils, Édouard III, roi d’Angleterre. Peut-elle transmettre un droit qu’elle ne peut elle-même exercer selon la coutume fixée dix ans plus tôt ? Édouard III se propose comme candidat, mais c’est Philippe VI de Valois qui est choisi. Il est le fils de Charles de Valois, frère cadet de Philippe le Bel et descend donc par les mâles de la lignée capétienne. Les pairs de France refusent de donner la couronne à un roi étranger, suivant la même logique de politique nationale que dix ans auparavant. Avec bien certaines réticences, Édouard III d’Angleterre prête alors hommage à Philippe VI, étant son vassal au titre de la Guyenne.
Édouard III, ayant prêté hommage et reconnu pour roi Philippe VI de Valois, et ayant dû accepter des concessions en Guyenne (mais il se réserve le droit de réclamer les territoires arbitrairement confisqués), il s'attend à ce qu'on lui laisse les mains libres en Écosse. Mais Philippe VI confirme son soutien à David Bruce, Édouard III saisit alors le prétexte de sa légitimité royale pour déclencher la guerre.
France en 1330
La querelle de Guyenne
Cette querelle est encore plus importante que la question dynastique pour expliquer le déclenchement de la guerre. La Guyenne pose un problème considérable aux rois de France et d’Angleterre : Édouard III se trouve être le vassal de Philippe VI de France et doit donc reconnaître la souveraineté du roi de France sur la Guyenne. Dans la pratique, un jugement rendu en Guyenne peut être soumis à un appel devant la cour de Paris et non pas à Londres. Le roi de France a donc, le pouvoir de révoquer toutes les décisions juridiques prises par le roi d'Angleterre en Aquitaine, ce qui est bien sûr totalement inacceptable pour les anglais. Dès lors, la souveraineté sur la Guyenne fait l'objet d'un conflit larvé entre les deux monarchies depuis plusieurs générations.
En 1323, le père de Philippe VI, Charles de Valois, en expédition pour le compte du roi Charles IV le Bel, fait saisir une bastide fortifiée construite par les Anglais à Saint-Sardos, en plein territoire du duc de Guyenne, malgré les plus vives protestations et recours en justice d'Edouard II d'Angleterre et du seigneur voisin Raymond-Bernard de Montpezat. Ce dernier répliqua par les armes le 16 octobre 1323, alors que le procureur du Roi de France se trouvait à St-Sardos pour officialiser l'alliance. A la tête de sa troupe, renforcée d'éléments anglais, le seigneur de Montpezat attaqua le château de St-Sardos et ruina le village. Il fit passer la garnison au fil de l'épée et le représentant de Charles IV fut pendu. Devant ce prétexte tout trouvé, le Parlement, arguant que le duc de Guyenne n’avait pas prêté hommage à son suzerain, confisque le duché en juillet 1324. Le roi de France envahit la quasi-totalité de l'Aquitaine mais accepta de mauvaise grâce de restituer ce territoire en 1325. Pour recouvrer son duché, le roi Édouard II d’Angleterre doit transiger : il envoie son fils, le futur Édouard III, prêter l’hommage mais le roi de France ne lui propose qu’une Guyenne amputée de l’Agenais. Les choses semblent se débloquer en 1327, à l’avènement d’Édouard III qui recouvre son duché contre la promesse d’une indemnité de guerre. Mais les Français, faisant traîner en longueur la remise des terres, forcent Édouard III à venir prêter hommage, ce qu’il fait le 6 juin 1329. Mais, lors de cette cérémonie, Philippe VI fait consigner que l’hommage n’est pas prêté pour les terres qui ont été détachées du duché de Guyenne par Charles IV le Bel (en particulier l’Agenais). Édouard considère que son hommage n’implique pas la renonciation de la revendication des terres extorquées.
Intrigues et déclaration de guerre
La tension monte entre les deux souverains d'autant que la noblesse pousse au conflit, elle débouche inévitablement sur la déclaration de guerre en 1337.
Le roi de France aide les Écossais dans leur combat contre l’Angleterre. C’est la politique menée depuis plusieurs siècles par les rois capétiens : il s’agit de la Vieille Alliance. Le roi d’Écosse, David Bruce, a été chassé par Édouard III en 1333 et Philippe VI l’héberge à Château-Gaillard et réarme ses partisans en attendant qu’il ait reconstitué des forces suffisantes pour reprendre pied en Écosse.
En 1334, il convoque les ambassadeurs anglais, dont l’archevêque de Canterbury et leur précise que l’Écosse de David Bruce est comprise dans la paix. En 1335, David Bruce peut attaquer les îles anglo-normandes grâce à une flotte financée par Philippe VI. C'est un échec, mais cela fait craindre à Édouard III une invasion de l'Angleterre.
Édouard III intrigue en Flandres, son mariage avec Philippa de Hainaut lui permet de tisser des liens dans le nord de la France et dans le Saint-Empire : Robert d'Artois est réfugié à Londres depuis 1336, il a acheté l'alliance du comte de Hainaut ainsi que celle de l'empereur Louis de Bavière pour 300 000 Florins et le Duc de Brabant ainsi que le comte Gueldre se tournent vers lui. Les Flamands sont outrés par le ralliement du comte Louis I de Flandre au roi de France et de la pression fiscale qui s'ensuit, mais en cas de relance du conflit avec le roi de France, ils devraient verser une lourde amende au pape (qui a le pouvoir de les excommunier ou de jeter l'interdit sur les villes flamandes). Il est prévu avec Jacob Van Artevelde (l'homme fort de l'opposition flamande) que les Flandres reconnaissent Édouard comme roi de France ce qui permet de contourner cet accord. Louis de Nevers réagit en arrêtant des marchands anglais. Édouard III coupe l’approvisionnement en laine de cette région en août 1336, menaçant son économie, constituée essentiellement de draperie et de tissage. La Flandre se révolte contre les Français en 1337.
Par mesure de rétorsion, Philippe VI décide donc de confisquer la Guyenne pour félonie. Édouard III d’Angleterre réplique en revendiquant la couronne de France. Le 7 octobre 1337, un archevêque est envoyé à Paris pour jeter le gant à «qui se dit roi de France». La guerre commence.